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Deuxième partie 第二部 1 一 Tout de suite après mon arrestation, j'ai été interrogé plusieurs fois. Mais il s'agissait d'interrogatoires d'identité qui n'ont pas duré longtemps. La première fois au commissariat, mon affaire semblait n'intéresser personne. Huit jours après, le juge d'instruction, au contraire, m'a regardé avec curiosité. Mais pour commencer, il m'a seulement demandé mon nom et mon adresse, ma profession, la date et le lieu de ma naissance. Puis il a voulu savoir si j'avais choisi un avocat. J'ai reconnu que non et je l'ai questionné pour savoir s'il était absolument nécessaire d'en avoir un. ?Pourquoi?? a-t-il dit. J'ai répondu que je trouvais mon affaire très simple. Il a souri en disant: ?C'est un avis. Pourtant, la loi est là. Si vous ne choisissez pas d'avocat, nous en désignerons un d'office.? J'ai trouvé qu'il était très commode que la justice se chargeat de ces détails. Je le lui ai dit. Il m'a approuvé et a conclu que la loi était bien faite. 我被捕之后,很快就被审讯了好几次。但讯问的都是身份之类,时间不长。第一次是在警察局,我的案子似乎谁都不感兴趣。八天之后,一位预审推事倒是好奇地看了看我。不过开始时,他也只是问问姓名、住址、职业、出生年月和地点。然后,他想知道我是否找了律师。我说没有,还问他是不是一定要有一个。“为什么这样问呢?”他说。我回答说我认为我的案子很简单。他微笑着说:“这是一种看法。不过,法律就是法律。如果您不找律师的话,我们将为您指定一个临时的。”我觉得法律还管这等小事,真是方便得很。我对他说了我的这一看法。他表示赞同,说法律制订得很好。 Au début, je ne l'ai pas pris au sérieux. Il m'a re?u dans une pièce tendue de rideaux, il avait sur son bureau une seule lampe qui éclairait le fauteuil où il m'a fait asseoir pendant que lui-même restait dans l'ombre. J'avais déjà lu une description semblable dans des livres et tout cela m'a paru un jeu. Après notre conversation, au contraire, je l'ai regardé et j'ai vu un homme aux traits fins, aux yeux bleus enfoncés, grand, avec une longue moustache grise et d'abondants cheveux presque blancs. Il m'a paru très raisonnable et, somme toute, sympathique, malgré quelques tics nerveux qui lui tiraient la bouche. En sortant, j'allais même lui tendre la main, mais je me suis souvenu à temps que j'avais tué un homme. 开始,我没有认真对待他。他是在一间挂着窗帘的房子里接待我的,他的桌子上只有一盏灯,照亮了他让我坐的那把椅子,而他自己却坐在黑暗中。我已经在书里读过类似的描写了,在我看来这一切都是一场游戏。谈话之后,我看清他了,我看到一个五官清秀的人,深蓝的眼睛,身材高大,长长的灰色小胡子,一头几乎全白的头发。我认为他是通情达理的,总之,是和蔼可亲的,虽然有时一种不由自主的抽搐扯动了他的嘴。出去的时候,我甚至想伸出手来跟他握手,幸亏我及时地想起来我杀过一个人。 Le lendemain, un avocat est venu me voir à la prison. Il était petit et rond, assez jeune, les cheveux soigneusement collés. Malgré la chaleur (j'étais en manches de chemise), il avait un costume sombre, un col cassé et une cravate bizarre à grosses raies noires et blanches. Il a posé sur mon lit la serviette qu'il portait sous le bras, s'est présenté et m'a dit qu'il avait étudié mon dossier. Mon affaire était délicate, mais il ne doutait pas du succès, si je lui faisais confiance. Je l'ai remercié et il m'a dit: ?Entrons dans le vif du sujet.? 第二天,一位律师到监狱里来看我。他又矮又胖,相当年轻,头发梳得服服帖帖。尽管天热(我穿着背心),他却穿着一身深色衣服,硬领子,系着一条很怪的领带,上面有黑色和白色的粗大条纹。他把夹在胳膊下的皮包放在我的桌上,自我作了介绍,对我说他研究了我的材料。我的案子不好办,但是如果我信任他,胜诉是没有疑问的。我向他表示感谢,他说:“咱们言归正传吧。” II s'est assis sur le lit et m'a expliqué qu'on avait pris des renseignements sur ma vie privée. On avait su que ma mère était morte récemment à l'asile. On avait alors fait une enquête à Marengo. Les instructeurs avaient appris que ?j'avais fait preuve d'insensibilité? le jour de l'enterrement de maman. ?Vous comprenez, m'a dit mon avocat, cela me gêne un peu de vous demander cela. Mais c'est très important. Et ce sera un gros argument pour l'accusation, si je ne trouve rien à répondre.? II voulait que je l'aide. Il m'a demandé si j'avais eu de la peine ce jour-là. Cette question m'a beaucoup étonné et il me semblait que j'aurais été très gêné si j'avais eu à la poser. J'ai répondu cependant que j'avais un peu perdu l'habitude de m'interroger et qu'il m'était difficile de la renseigner. Sans doute, j'aimais bien maman, mais cela ne voulait rien dire. Tous les êtres sains avaient plus ou moins souhaité la mort de ceux qu'ils aimaient. Ici, l'avocat m'a coupé et a paru très agité. Il m'a fait promettre de ne pas dire cela à l'audience, ni chez le magistrat instructeur. Cependant, je lui ai expliqué que j'avais une nature telle que mes besoins physiques dérangeaient souvent mes sentiments. Le jour où j'avais enterré maman, j'étais très fatigué, et j'avais sommeil. De sorte que je ne me suis pas rendu compte de ce qui se passait. Ce que je pouvais dire à coup s?r, c'est que j'aurais préféré que maman ne mour?t pas. Mais mon avocat n'avait pas l'air content. Il m'a dit: ?Ceci n'est pas assez.? 他在我的床上坐下,对我说,他们已经了解了我的私生活。他们知道了我妈妈最近死在养老院里。他们到马朗戈去做过调查。预审推事们知道了我在妈妈下葬的那天“表现得麻木不仁。”我的律师对我说:“您知道,我有点不好意思问您这些事。但这很重要。假使我无言以对的话,这将成为起诉的一条重要的根据。”他要我帮助他。他问我那一天是否感到难过,这个问题使我十分惊讶,我觉得要是我提这个问题的话,我会很为难的。不过,我回答他说我有点失去了回想的习惯,我很难向他提供情况。毫无疑问,我很爱妈妈,但是这不说明任何问题。所有健康的人都或多或少盼望过他们所爱的人死去。说到这儿,律师打断了我,显得激动不安。他要我保证不在庭上说这句话,也不在预审法官那儿说。不过,我对他说我有一种天性,就是肉体上的需要常常使我的感情混乱。安葬妈妈的那天,我很疲倦,也很困,我根本没体会到那天的事的意义。我能够肯定地说的,就是我更希望妈妈不死。但是我的律师没有显出高兴的样子。他对我说:“这还不够。” Il a réfléchi. Il m'a demandé s'il pouvait dire que ce jour-là j'avais dominé mes sentiments naturels. Je lui ai dit: ?Non, parce que c'est faux.? II m'a regardé d'une fa?on bizarre, comme si je lui inspirais un peu de dégo?t. Il m'a dit presque méchamment que dans tous les cas le directeur et le personnel de l'asile seraient entendus comme témoins et que ?cela pouvait me jouer un très sale tour?. Je lui ai fait remarquer que cette histoire n'avait pas de rapport avec mon affaire, mais il m'a répondu seulement qu'il était visible que je n'avais jamais eu de rapports avec la justice. 他想了想。他问我他是否可以说那一天我是控制住了我天生的感情。我对他说:“不能,因为这是假话。”他以一种很怪的方式望了望我,仿佛我使他感到有些厌恶似的。他几乎是不怀好意地说,无论如何,养老院的院长和工作人员将会出庭作证,这将会使我“大吃其亏”。我请他注意这件事和我的案子没有关系,他只是说,明显的是,我和法院从来没有关系。 Il est parti avec un air faché. J'aurais voulu le retenir, lui expliquer que je désirais sa sympathie, non pour être mieux défendu, mais, si je puis dire, naturellement. Surtout, je voyais que je le mettais mal à l'aise. Il ne me comprenait pas et il m'en voulait un peu. J'avais le désir de lui affirmer que j'étais comme tout le monde, absolument comme tout le monde. Mais tout cela, au fond, n'avait pas grande utilité et j'y ai renoncé par paresse. 他很生气地走了。我真想叫住他,向他解释说我希望得到他的同情,不是为了得到更好的辩护,而是,如果我可以这样说的话,得到合乎人性的辩护。特别是我看到我使他很不痛快。他不理解我,他有点怨恨我。我想对他说,我和大家一样,绝对地和大家一样。可是,这一切实际上并没有多大用处,而且我也懒得去说。 Peu de temps après, j'étais conduit de nouveau devant le juge d'instruction. Il était deux heures de l'après-midi et cette fois, son bureau était plein d'une lumière à peine tamisée par un rideau de voile. Il faisait très chaud. Il m'a fait asseoir et, avec beaucoup de courtoisie, m'a déclaré que mon avocat, ?par suite d'un contretemps?, n'avait pu venir. Mais j'avais le droit de ne pas répondre à ses questions et d'attendre que mon avocat p?t m'assister. J'ai dit que je pouvais répondre seul. Il a touché du doigt un bouton sur la table. Un jeune greffier est venu s'installer presque dans mon dos. 不久之后,我又被带到预审推事面前。时间是午后两点钟,这一次,他的办公室里很亮,只有一层纱窗帘挡住阳光。天气很热。他让我坐下,他很客气地对我说,我的律师“因为不凑巧”没有能来。但是,我有权利不回答他的问题,等待我的律师来帮助我。我说我可以单独回答。他用指头接了按桌上的一个电钮。一个年轻的书记进来,几乎就在我的背后坐下了。 Nous nous sommes tous les deux carrés dans nos fauteuils. L'interrogatoire a commencé. Il m'a d'abord dit qu'on me dépeignait comme étant d'un caractère taciturne et renfermé et il a voulu savoir ce que j'en pensais. J'ai répondu: ?C'est que je n'ai jamais grand-chose à dire. Alors je me tais.? Il a souri comme la première fois, a reconnu que c'était la meilleure des raisons et a ajouté: ?D'ailleurs, cela n'a aucune importance.? Il s'est tu, m'a regardé et s'est redressé assez brusquement pour me dire très vite: ?Ce qui m'intéresse, c'est vous.? Je n'ai pas bien compris ce qu'il entendait par là et je n'ai rien répondu. ?Il y a des choses, a-t-il ajouté, qui m'échappent dans votre geste. Je suis s?r que vous allez m'aider à les comprendre.? J'ai dit que tout était très simple. Il m'a pressé de lui retracer ma journée. Je lui ai retracé ce que déjà je lui avais raconté : Raymond, la plage, le bain, la querelle, encore la plage, la petite source, le soleil et les cinq coups de revolver. A chaque phrase il disait: ?Bien, bien.? Quand je suis arrivé au corps étendu, il a approuvé en disant: ?Bon.? Moi, j'étais lassé de répéter ainsi la même histoire et il me semblait que je n'avais jamais autant parlé. 我们俩都舒舒服服地坐在椅子上。讯问开始。他首先说人家把我描绘成一个生性缄默孤僻的人,他想知道对此我有什么看法。我回答说:“因为我没什么可说的,于是我就不说话。”他像第一次一样笑了笑,承认这是最好的理由,接着又补充了一句:“再说,这无关紧要。”他不说话了,看了看我,然后相当突然地把身子一挺,很快地对我说:“我感兴趣的,是您这个人。”我不大明白他说的是什么意思,没有回答。他又说:“在您的举动中,有些事情我不大明白。我相信您将帮助我理解。”我说一切都很简单。他让我把那天的情形再讲一遍。我把对他讲过的东西又说了一遍:莱蒙、海滩、游泳、打架,又是海滩、小水泉、太阳和开了五熗。我每说一句,他都说:“好,好。”当我说到直躺在地上的尸体时,他同意地说道:“很好。”而我呢,翻来覆去地说一件事已经让我烦了,我觉得我从来没有说过这么多的话。 Après un silence, il s'est levé et m'a dit qu'il voulait m'aider, que je l'intéressais et qu'avec l'aide de Dieu, il ferait quelque chose pour moi. Mais auparavant, il voulait me poser encore quelques questions. Sans transition, il m'a demandé si j'aimais maman. J'ai dit: ?Oui, comme tout le monde? et le greffier, qui jusqu'ici tapait régulièrement sur sa machine, a d? se tromper de touches, car il s'est embarrassé et a été obligé de revenir en arrière. Toujours sans logique apparente, le juge m'a alors demandé si j'avais tiré les cinq coups de revolver à la suite. J'ai réfléchi et précisé que j'avais tiré une seule fois d'abord et, après quelques secondes, les quatre autres coups. ?Pourquoi avez-vous attendu entre le premier et le second coup?? dit-il alors. Une fois de plus, j'ai revu la plage rouge et j'ai senti sur mon front la br?lure du soleil. Mais cette fois, je n'ai rien répondu. Pendant tout le silence qui a suivi le juge a eu l'air de s'agiter. Il s'est assis, a fourragé dans ses cheveux, a mis ses coudes sur son bureau et s'est penché un peu vers moi avec un air étrange: ?Pourquoi, pourquoi avez-vous tiré sur un corps à terre?? Là encore, je n'ai pas su répondre. Le juge a passé ses mains sur son front et a répété sa question d'une voix un peu altérée: ?Pourquoi? Il faut que vous me le disiez. Pourquoi?? Je me taisais toujours. 他停了一会儿,站起来,对我说他愿意帮助我,我使他感兴趣,如果上帝帮忙的话,他一定能为我做点什么。不过在此之前,他想问我几个问题。开门见山,他问我是不是爱妈妈。我说:“爱,像大家一样。”一直有节奏地敲着打字机的书记一定是按错了键子,因为他很不自在,不得不往回退机器。推事又问我——表面上看不出有什么逻辑性——,是不是连续开了五熗。我想了想,说先开了一熗,几秒钟之后,又开了四熗。于是他问:“为什么您在第一熗和第二熗之间停了停?”这时,我又看见了那阳光火爆的海滩,我又感到了太阳炙烤着我的额头。但是这一次我什么也没说。在一片沉默中,推事好像坐立不安。他坐下来,抓了抓头发,把胳膊肘支在桌子上,微微朝我俯下身来,神情很奇特:“为什么,为什么您还往一个死人身上开熗呢?”这个问题,我也不知道如何回答。推事把双手放在前额上,重复了他的问题,声音都有点儿变了:“为什么?您得对我说。为什么?”我一直不说话。 Brusquement, il s'est levé, a marché à grands pas vers une extrémité de son bureau et a ouvert un tiroir dans un classeur. Il en a tiré un crucifix d'argent qu'il a brandi en revenant vers moi. Et d'une voix toute changée, presque tremblante, il s'est écrié: ?Est-ce que vous le connaissez, celui-là?? J'ai dit : ?Oui, naturellement.? Alors il m'a dit très vite et d'une fa?on passionnée que lui croyait en Dieu, que sa conviction était qu'aucun homme n'était assez coupable pour que Dieu ne lui pardonnat pas, mais qu'il fallait pour cela que l'homme par son repentir dev?nt comme un enfant dont l'ame est vide et prête à tout accueillir. Il avait tout son corps penché sur la table. Il agitait son crucifix presque au-dessus de moi. A vrai dire, je l'avais très mal suivi dans son raisonnement, d'abord parce que j'avais chaud et qu'il y avait dans son cabinet de grosses mouches qui se posaient sur ma figure, et aussi parce qu'il me faisait un peu peur. Je reconnaissais en même temps que c'était ridicule parce que, après tout, c'était moi le criminel. Il a continué pourtant. J'ai à peu près compris qu'à son avis il n'y avait qu'un point d'obscur dans ma confession, le fait d'avoir attendu pour tirer mon second coup de revolver. Pour le reste, c'était très bien, mais cela, il ne le comprenait pas.J'allais lui dire qu'il avait tort de s'obstiner : ce dernier point n'avait pas tellement d'importance. Mais il m'a coupé et m'a exhorté une dernière fois, dressé de toute sa hauteur, en me demandant si je croyais en Dieu. J'ai répondu que non. Il s'est assis avec indignation. Il m'a dit que c'était impossible, que tous les hommes croyaient en Dieu, même ceux qui se détournaient de son visage. C'était là sa conviction et, s'il devait jamais en douter, sa vie n'aurait plus de sens. ?Voulez-vous, s'est-il exclamé, que ma vie n'ait pas de sens?? A mon avis, cela ne me regardait pas et je le lui ai dit. Mais à travers la table, il avan?ait déjà le Christ sous mes yeux et s'écriait d'une fa?on déraisonnable: ?Moi, je suis chrétien. Je demande pardon de tes fautes à celui-là. Comment peux-tu ne pas croire qu'il a souffert pour toi?? J'ai bien remarqué qu'il me tutoyait, mais j'en avais assez. La chaleur se faisait de plus en plus grande. Comme toujours, quand j'ai envie de me débarrasser de quelqu'un que j'écoute à peine, j'ai eu l'air d'approuver. A ma surprise, il a triomphé: ?Tu vois, tu vois, disait-il. N'est-ce pas que tu crois et que tu vas te confier à lui?? Evidemment, j'ai dit non une fois de plus. Il est retombé sur son fauteuil. 突然,他站了起来,大步走到他的办公室一头的一个档案柜前,拉开一个抽屉。他拿出一个银十字架,一边摇晃着,一边朝我走来。他的声音完全变了,几乎是颤抖地大声问我:“这件东西,您认得吗?”我说:“认得,当然认得。”于是他很快地、热情洋溢地说他相信上帝,他的信念是任何一个人也不会罪孽深重到上帝不能饶恕的程度,但是他必须悔过,要变成孩子那样,灵魂是空的,什么都能接受。他整个身子都俯在桌子上,差不多就在我的头顶上摇晃着十字架。说真的,他的这番推理,我真跟不上,首先是因为我热,他的办公室里有几只大苍蝇,落在我的脸上,也因为我有点儿怕他。不过我认为这是可笑的,因为无论如何罪犯毕竟还是我。可是,他还在说。我差不多听明白了,据他看,在我的供词中只有一点不清楚,那就是等了一下才开第二熗这一事实。其余的都很明白,但这一点,他不懂。我正要跟他说他这样固执是没有道理的,因为这最后一点并不那么重要。但他打断了我,挺直了身子,劝告了我一番,问我是否信仰上帝。我回答说不。他愤怒地坐下了,说这是不可能的,所有的人都信仰上帝,甚至那些背弃上帝的人都信仰上帝。这是他的信念,如果他要怀疑这一点的话,他的生活就失去了意义。他叫道:“您难道要使我的生活失去意义吗?”我认为,这与我无关,我跟他说了。但他已经隔着桌子把刻着基督受难像的十字架伸到我的眼皮底下,疯狂地大叫起来:“我,我是基督徒。我要请求他饶恕你的罪过。你怎么能不相信他是为你而受难呢?”我清楚地注意到他用“你”来称呼我了,但我已厌倦了。屋子里越来越热。跟平时一样,当我想摆脱一个我不愿意听他说话的人时,我就作出赞同的样子。出乎我的意料,他竟真的以为是打胜了:“你看,你看,”他说,“你是不是也信了?你是不是要把真话告诉他了?”当然,我又说了一次“不”。他一屁股坐在他的椅子上。 Il avait l'air très fatigué. Il est resté un moment silencieux pendant que la machine, qui n'avait pas cessé de suivre le dialogue, en prolongeait encore les dernières phrases. Ensuite, il m'a regardé attentivement et avec un peu de tristesse. Il a murmuré: ?Je n'ai jamais vu d'ame aussi endurcie que la v?tre. Les criminels qui sont venus devant moi ont toujours pleuré devant cette image de la douleur.? J'allais répondre que c'était justement parce qu'il s'agissait de criminels. Mais j'ai pensé que moi aussi j'étais comme eux. C'était une idée à quoi je ne pouvais pas me faire. Le juge s'est alors levé, comme s'il me signifiait que l'interrogatoire était terminé. Il m'a seulement demandé du même air un peu las si je regrettais mon acte. J'ai réfléchi et j'ai dit que, plut?t que du regret véritable, j'éprouvais un certain ennui. J'ai eu l'impression qu'il ne me comprenait pas. Mais ce jour-là les choses ne sont pas allées plus loin. 他好像很累,待了好久没说话,而打字机一直跟着我们的对话,还在打着最后的几句话。然后,他注视着我,有点儿伤心,轻声地说:“我从未见过您这样顽固的灵魂。来到我面前的罪犯看到这个受苦受难的形象,没有不痛哭流涕的。”我正要回答他这恰恰说的是罪犯,可是我想起来我也跟他们一样。这种想法我却总也不能习惯。这时,推事站了起来,好像告诉我审讯已经结束。他的样子还是那么厌倦,只问了问我对我的行动是否感到悔恨。我想了想,说与其说是真正的悔恨,不如说是某种厌烦。我觉得他不明白我的话。不过,那天发生的事情也就到此为止了。 Par la suite j'ai souvent revu le juge d'instruction. Seulement, j'étais accompagné de mon avocat à chaque fois. On se bornait à me faire préciser certains points de mes déclarations précédentes. Ou bien encore le juge discutait les charges avec mon avocat. Mais en vérité ils ne s'occupaient jamais de moi à ces moments-là. Peu à peu en tout cas, le ton des interrogatoires a changé. Il semblait que le juge ne s'intéressat plus à moi et qu'il e?t classé mon cas en quelque sorte. Il ne m'a plus parlé de Dieu et je ne l'ai jamais revu dans l'excitation de ce premier jour. Le résultat, c'est que nos entretiens sont devenus plus cordiaux. Quelques questions, un peu de conversation avec mon avocat, les interrogatoires étaient finis. Mon affaire suivait son cours, selon l'expression même du juge. Quelquefois aussi, quand la conversation était d'ordre général, on m'y mêlait. Je commen?ais à respirer. Personne, en ces heures-là, n'était méchant avec moi. Tout était si naturel, si bien réglé et si sobrement joué que j'avais l'impression ridicule de ?faire partie de la famille?. Et au bout des onze mois qu'a duré cette instruction, je peux dire que je m'étonnais presque de m'être jamais réjoui d'autre chose que de ces rares instants où le juge me reconduisait à la porte de son cabinet en me frappant sur l'épaule et en me disant d'un air cordial: ?C'est fini pour aujourd'hui, monsieur l'Antéchrist.? On me remettait alors entre les mains des gendarmes. 后来,我经常见到这位预审推事。只是我每次都有律师陪着。他们只是让我对过去说过的东西的某些地方再明确一下,或者是推事和我的律师讨论控告的罪名。但实际上,这些时候他们根本就不管我了。反正是渐渐地,审讯的调子变了。好像推事对我已经不感兴趣了,他已经以某种方式把我的案子归档了。他不再跟我谈上帝了,我也再没有看见他像第一天那样激动过。结果,我们的谈话反而变得更亲切了。提几个问题,跟我的律师聊聊,审讯就结束了。用推事的话说,我的案子照常进行。有时候,如果谈的是一般性的问题,他们就把我也拉上。我开始喘过气来了。这时,人人对我都不坏。一切都是这样自然,解决得这样好,演得这样干净利落,竟至于我有了“和他们都是自家人”的可笑感觉。预审持续了十一个月,我可以说,我有点惊奇的是,有生以来最使我快活的竟是有那么不多的几次,推事把我送到他的办公室门口,拍着我的肩膀亲切地说:“今天就到此为止,反基督先生。”然后,他们再把我交到法警手里。 2 二 Il y a des choses dont je n'ai jamais aimé parler. Quand je suis entré en prison, j'ai compris au bout de quelques jours que je n'aimerais pas parler de cette partie de ma vie. 有些事情我是从来也不喜欢谈的。自从我进了监狱,没过几天我就知道,我将来是不喜欢谈论我这一段生活的。 Plus tard, je n'ai plus trouvé d'importance à ces répugnances. En réalité, je n'étais pas réellement en prison les premiers jours: j'attendais vaguement quelque événement nouveau. C'est seulement après la première et la seule visite de Marie que tout a commencé. Du jour où j'ai re?u sa lettre (elle me disait qu'on ne lui permettait plus de venir parce qu'elle n'était pas ma femme), de ce jour-là, j'ai senti que j'étais chez moi dans ma cellule et que ma vie s'y arrêtait. Le jour de mon arrestation, on m'a d'abord enfermé dans une chambre où il y avait déjà plusieurs détenus, la plupart des Arabes. Ils ont ri en me voyant. Puis ils m'ont demandé ce que j'avais fait. J'ai dit que j'avais tué un Arabe et ils sont restés silencieux. Mais un moment après, le soir est tombé. Ils m'ont expliqué comment il fallait arranger la natte où je devais coucher. En roulant une des extrémités, on pouvait en faire un traversin. Toute la nuit, des punaises ont couru sur mon visage. Quelques jours après, on m'a isolé dans une cellule où je couchais sur un bat-flanc de bois. J'avais un baquet d'aisances et une cuvette de fer. La prison était tout en haut de la ville et, par une petite fenêtre, je pouvais voir la mer. C'est un jour que j'étais agrippé aux barreaux, mon visage tendu vers la lumière, qu'un gardien est entré et m'a dit que j'avais une visite. J'ai pensé que c'était Marie. C'était bien elle. 不过,后来我也没发现反感有什么必要。实际上,头几天我并不是真的在坐牢,我在模模糊糊地等着什么新情况。直到第一次,也是唯一的一次,玛丽来看我之后,一切才开始。从我收到她的信那一天起(她说人家不允许她再来了,因为她不是我的妻子),就是从那一天起,我才感到我住的地方是牢房,我的生活到此为止了。我被捕的那一天,他们先把我关在一间已经有好几个囚犯的牢房里,其中大部分是阿拉伯人。他们看见我都笑了。然后他们问我犯了什么事儿。我说我杀了一个阿拉伯人,他们就都不说话了。但过了一会儿,天就黑了。他们告诉我怎样铺睡觉的席子。把一头卷起来,就可以做成一个长枕头。整整的一夜,臭虫在我脸上爬。几天之后,我被关进一个单间,睡在一块木板上。我还有一个便桶和一个铁盆儿。监狱建在本城的高地上,透过一个小窗口,我可以看见大海。有一天,我正抓着铁栏杆,脸朝着有亮的地方,一个看守进来,说有人来看我。我想这是玛丽。果然是她。 J'ai suivi pour aller au parloir un long corridor, puis un escalier et pour finir un autre couloir. Je suis entré dans une très grande salle éclairée par une vaste baie. La salle était séparée en trois parties par deux grandes grilles qui la coupaient dans sa longueur. Entre les deux grilles se trouvait un espace de huit à dix mètres qui séparait les visiteurs des prisonniers. J'ai aper?u Marie en face de moi avec sa robe à raies et son visage bruni. De mon c?té, il y avait une dizaine de détenus, des Arabes pour la plupart. Marie était entourée de Mauresques et se trouvait entre deux visiteuses: une petite vieille aux lèvres serrées, habillée de noir, et une grosse femme en cheveux qui parlait très fort avec beaucoup de gestes. A cause de la distance entre les grilles, les visiteurs et les prisonniers étaient obligés de parler très haut. Quand je suis entré, le bruit des voix qui rebondissaient contre les grands murs nus de la salle, la lumière crue qui coulait du ciel sur les vitres et rejaillissait dans la salle, me causèrent une sorte d'étourdissement. Ma cellule était plus calme et plus sombre. Il m'a fallu quelques secondes pour m'adapter. Pourtant, j'ai fini par voir chaque visage avec netteté, détaché dans le plein jour. J'ai observé qu'un gardien se tenait assis à l'extrémité du couloir entre les deux grilles. La plupart des prisonniers arabes ainsi que leurs familles s'étaient accroupis en vis-à-vis. Ceux-là ne criaient pas. Malgré le tumulte, ils parvenaient à s'entendre en parlant très bas. Leur murmure sourd, parti de plus bas, formait comme une basse continue aux conversations qui s'entrecroisaient au-dessus de leurs têtes. Tout cela, je l'ai remarqué très vite en m'avan?ant vers Marie. Déjà collée contre la grille, elle me souriait de toutes ses forces. Je l'ai trouvée très belle, mais je n'ai pas su le lui dire. 要到接待室去,得穿过一条长走廊,上一段台阶,最后再穿过一条走廊。我走进去,那是一个明亮的大厅,光线是从一个大窗户里射进来的。两道大铁栅横着把大厅分成三部分。两道铁栅之间相距约八到十米,把探望的人和囚犯隔开。我看见玛丽在我面前,她穿着带条子的连衣裙,脸晒得黑黑的。跟我站在一起的有十几个囚犯,大部分是阿拉伯人。玛丽周围都是摩尔人,身旁的两个,一个是身材矮小的老太太,紧闭着嘴唇,穿着黑衣服,另一个是没戴帽子的胖女人,说话指手划脚,声音很高。由于铁栅间的距离,探望的人和囚犯都不得不高声叫嚷。我进去之后,吵吵嚷嚷的声音传到光秃秃的大墙上又折回来,明亮的阳光从天上泻到玻璃上射进大厅,使我感到头昏眼花。我的牢房又静又暗。我得有好几秒钟才能适应。但是,我最后还是看清了呈现在光亮中的每一张面孔。我注意到一个看守坐在铁栅间通道的尽头。大部分阿拉伯囚犯和他们的家人都面对面地蹲着。他们不大叫大嚷。尽管大厅里乱糟糟的,他们低声说话彼此例还听得见。他们沉闷的低语声从下面升上来,在他们头上来往穿行的谈话声中,好像是一个持续不断的低音部。这一切,我都是在朝着玛丽走去时注意到的。她已经紧紧地贴在铁栏杆上,竭力朝着我笑。我觉得她很美,但我不知道怎样和她说这件事。 ?Alors ? m'a-t-elle dit très haut. — Alors, voilà. — Tu es bien, tu as tout ce que tu veux? — Oui, tout.? Nous nous sommes tus et Marie souriait toujours. La grosse femme hurlait vers mon voisin, son mari sans doute, un grand type blond au regard franc. C'était la suite d'une conversation déjà commencée. ?Jeanne n'a pas voulu le prendre?, criait-elle à tue-tête. ?Oui, oui?, disait l'homme. ?Je lui ai dit que tu le reprendrais en sortant, mais elle n'a pas voulu le prendre.? “怎么样?”她大声问道。 “就是这样。” “身体好吗?需要的东西都有吗?” “好,都有。” 我们都不说话了,玛丽一直在微笑。那个胖女人对着我身边的一个人大叫,那人无疑是她的丈夫,个子很高,金黄头发,目光坦率。我听到的是一段已经开始的谈话的下文。 “让娜不愿意要他,”她扯着嗓子大叫。 “哦,哦,”那男人说。 “我跟她说你出来后会再雇他的,她还是不愿意。” Marie a crié de son c?té que Raymond me donnait le bonjour et j'ai dit: ?Merci.? Mais ma voix a été couverte par mon voisin qui a demandé ?s'il allait bien?. Sa femme a ri en disant ?qu'il ne s'était jamais mieux porté?. Mon voisin de gauche, un petit jeune homme aux mains fines, ne disait rien. J'ai remarqué qu'il était en face de la petite vieille et que tous les deux se regardaient avec intensité. Mais je n'ai pas eu le temps de les observer plus longtemps parce que Marie m'a crié qu'il fallait espérer. J'ai dit: ?Oui.? En même temps, je la regardais et j'avais envie de serrer son épaule par-dessus sa robe. J'avais envie de ce tissu fin et je ne savais pas très bien ce qu'il fallait espérer en dehors de lui. Mais c'était bien sans doute ce que Marie voulait dire parce qu'elle souriait toujours. Je ne voyais plus que l'éclat de ses dents et les petits plis de ses yeux. Elle a crié de nouveau: ?Tu sortiras et on se mariera!? J'ai répondu: ?Tu crois?? mais c'était surtout pour dire quelque chose. Elle a dit alors très vite et toujours très haut que oui, que je serais acquitté et qu'on prendrait encore des bains. Mais l'autre femme hurlait de son c?té et disait qu'elle avait laissé un panier au greffe. Elle énumérait tout ce qu'elle y avait mis. Il fallait vérifier, car tout cela co?tait cher. Mon autre voisin et sa mère se regardaient toujours. Le murmure des Arabes continuait au-dessous de nous. Dehors la lumière a semblé se gonfler contre la baie. 玛丽也对我大声说莱蒙问我好,我说:“谢谢。”但我的声音被我旁边那人给盖住了,他正问“他可好”。他老婆笑着回答道:“他的身体从来没有这样好过。”我左面是个矮小的年轻人,手很纤细。他什么也不说。我注意到他对面是那位小老太太,两个人紧紧地相互望着。不过我没有时间再观察他们了,因为玛丽对我喊道不要失望。我说:“对。”同时,我望着她,我真想隔着裙子搂住她的肩膀,我真想摸摸这细腻的布料,我不太清楚除此之外还应该盼望什么。但是这肯定就是玛丽刚才的意思,因为她一直在微笑。我只看到她发亮的牙齿和眼角上细细的皱纹。她又喊道:“你会出来的,出来就结婚广我回答道:“你相信吗?”但主要是为了找点话说罢了。她于是很快地大声说她相信,我将被释放,我们还去游泳。但那个女人又吼起来,说她在书记室留了个篮子。她一样一样讲她放在里面的东西,要查对一下,因为这些东西很贵。我另一边的邻居和他母亲一直互相望着。地上蹲着的阿拉伯人在继续低声交谈。外面的光线好像越来越强,直射在窗户上。 Je me sentais un peu malade et j'aurais voulu partir. Le bruit me faisait mal. Mais d'un autre c?té, je voulais profiter encore de la présence de Marie. Je ne sais pas combien de temps a passé. Marie m'a parlé de son travail et elle souriait sans arrêt. Le murmure, les cris, les conversations se croisaient. Le seul ?lot de silence était à c?té de moi dans ce petit jeune homme et cette vieille qui se regardaient. Peu à peu, on a emmené les Arabes. Presque tout le monde s'est tu dès que le premier est sorti. La petite vieille s'est rapprochée des barreaux et, au même moment, un gardien a fait signe à son fils. Il a dit: ?Au revoir, maman? et elle a passé sa main entre deux barreaux pour lui faire un petit signe lent et prolongé. 我感到有些不舒服,真想走开。嘈杂声让我难受。但另一方面,我又想多看看玛丽。我不知道过了多少时间。玛丽跟我讲她的工作,她不住地微笑。低语声,喊叫声,谈话声交织成一片。唯有我身边那个矮小的年轻人和那个老太太之间是一个寂静的小孤岛,他们只是互相望着。渐渐地,阿拉伯人都被带走了。第一个人一走,几乎所有的人都不说话了。那个小老太太走近铁栏杆,这时,一个看守向她的儿子打了个手势。他说:“再见,妈妈。”她把手从两根铁栏杆间伸出来,慢慢地,持续地摆了摆。 Elle est partie pendant qu'un homme entrait, le chapeau à la main, et prenait sa place. On a introduit un prisonnier et ils se sont parlé avec animation, mais à demi-voix, parce que la pièce était redevenue silencieuse. On est venu chercher mon voisin de droite et sa femme lui a dit sans baisser le ton comme si elle n'avait pas remarqué qu'il n'était plus nécessaire de crier: ?Soigne-toi bien et fais attention.? Puis est venu mon tour. Marie a fait signe qu'elle m'embrassait. Je me suis retourné avant de dispara?tre. Elle était immobile, le visage écrasé contre la grille, avec le même sourire écartelé et crispé. 她一走,一个男人进来,手里拿着帽子,占了她留下的那块地方。这一边也有一个犯人被带了进来,他们热烈地谈了起来,但声音很小,因为大厅已经安静下来了。有人来叫我右边的那个人了,他老婆并没有放低声音,好像她没注意到已经不需要喊叫了:“保重,小心。”然后就该我了。玛丽做出吻我的姿势。我在出去之前又回了回头。她站着不动,脸紧紧地贴在铁栅栏上,还带着为难的、不自然的微笑。 C'est peu après qu'elle m'a écrit. Et c'est à partir de ce moment qu'ont commencé les choses dont je n'ai jamais aimé parler. De toute fa?on, il ne faut rien exagérer et cela m'a été plus facile qu'à d'autres. Au début de ma détention, pourtant, ce qui a été le plus dur, c'est que j'avais des pensées d'homme libre. Par exemple, l'envie me prenait d'être sur une plage et de descendre vers la mer. A imaginer le bruit des premières vagues sous la plante de mes pieds, l'entrée du corps dans l'eau et la délivrance que j'y trouvais, je sentais tout d'un coup combien les murs de ma prison étaient rapprochés. Mais cela dura quelques mois. Ensuite, je n'avais que des pensées de prisonnier. J'attendais la promenade quotidienne que je faisais dans la cour ou la visite de mon avocat. Je m'arrangeais très bien avec le reste de mon temps. J'ai souvent pensé alors que si l'on m'avait fait vivre dans un tronc d'arbre sec, sans autre occupation que de regarder la fleur du ciel au-dessus de ma tête, je m'y serais peu à peu habitué. J'aurais attendu des passages d'oiseaux ou des rencontres de nuages comme j'attendais ici les curieuses cravates de mon avocat et comme, dans un autre monde, je patientais jusqu'au samedi pour étreindre le corps de Marie. Or, à bien réfléchir, je n'étais pas dans un arbre sec. Il y avait plus malheureux que moi. C'était d'ailleurs une idée de maman, et elle le répétait souvent, qu'on finissait par s'habituer à tout. 她的信是那以后不久写的。那些我从来也不喜欢讲的事情也是从这时候开始的。不管怎么说,不该有任何的夸大,这件事我做起来倒比别的事容易。在我被监禁的开始,最使我感到难以忍受的是,我还常有一些自由人的念头。例如,我想去海滩,朝大海走去。我想象着最先冲到我脚下的海浪的响声,身体跳进水里以及我所感到的解脱,这时我才一下子感到了牢房的四壁相距是多么的近。但这只持续了几个月。然后,我就只有囚徒的想法了。我等待着每日在院子里放风或我的律师来访。其余的时间,我也安排得很好。我常常想,如果让我住在一棵枯树干里,除了抬头看看天上的流云之外无事可干,久而久之,我也会习惯的。我会等待着鸟儿飞过或白云相会,就像我在这里等待着我的律师的奇特的领带,或者就像我在另一个世界里耐心等到星期六拥抱玛丽的肉体一样。何况,认真想想,我并不在一棵枯树干里。还有比我更不幸的人。不过,这是妈妈的一个想法,她常常说,到头来,人什么都能习惯。 Du reste, je n'allais pas si loin d'ordinaire. Les premiers mois ont été durs. Mais justement l'effort que j'ai d? faire aidait à les passer. Par exemple, j'étais tourmenté par le désir d'une femme. C'était naturel, j'étais jeune. Je ne pensais jamais à Marie particulièrement. Mais je pensais tellement à une femme, aux femmes, à toutes celles que j'avais connues, à toutes les circonstances où je les avais aimées, que ma cellule s'emplissait de tous les visages et se peuplait de mes désirs. Dans un sens, cela me déséquilibrait. Mais dans un autre, cela tuait le temps. J'avais fini par gagner la sympathie du gardien-chef qui accompagnait à l'heure des repas le gar?on de cuisine. C'est lui qui, d'abord, m'a parlé des femmes. Il m'a dit que c'était la première chose dont se plaignaient les autres. Je lui ai dit que j'étais comme eux et que je trouvais ce traitement injuste. ?Mais, a-t-il dit, c'est justement pour ?a qu'on vous met en prison. — Comment, pour ?a ? — Mais oui, la liberté, c'est ?a. On vous prive de la liberté.? Je n'avais jamais pensé à cela. Je l'ai approuvé: ?C'est vrai, lui ai-je dit, où serait la punition? — Oui, vous comprenez les choses, vous. Les autres non. Mais ils finissent par se soulager eux-mêmes.? Le gardien est parti ensuite. 况且,一般地说,我并没有到这种程度。开头几个月很苦。但是我不得不努力克制,也就过来了。例如,我老是想女人。这很自然,我还年轻嘛。我从不特别想到玛丽。我是想到女人,随便哪一个女人,所有我过去认识的女人,想到我爱过她们的各种各样的场合,想来想去,牢房里竟充满了一张张女人的面孔,到处只见我的性欲的冲动。从某种意义上说,这使我的精神失常,但从另一种意义上说,这却使我消磨了时间。我终于赢得了看守长的好感,他总是在开饭的时候跟厨房的伙计一道来。是他先跟我谈起了女人。他跟我说这也是其他人所抱怨的头一件大事。我对他说我跟他们一样,我认为这种待遇不公正。“可是,”他说,“正是为了这个才让您坐监狱呀。” “什么?为了这个?” “是啊,自由,就是这个呀。您被剥夺了自由。” 我从来没想到这一层。我同意他的看法,我说:“不错,不然的话,惩罚什么呢?” “对,您明白事理。他们不懂。最后他们总是自己想办法。”看守说完就走了。 Il y a eu aussi les cigarettes. Quand je suis entré en prison, on m'a pris ma ceinture, mes cordons de souliers, ma cravate et tout ce que je portais dans mes poches, mes cigarettes en particulier. Une fois en cellule, j'ai demandé qu'on me les rende. Mais on m'a dit que c'était défendu. Les premiers jours ont été très durs. C'est peut-être cela qui m'a le plus abattu. Je su?ais des morceaux de bois que j'arrachais de la planche de mon lit. Je promenais toute la journée une nausée perpétuelle. Je ne comprenais pas pourquoi on me privait de cela qui ne faisait de mal à personne. Plus tard, j'ai compris que cela faisait partie aussi de la punition. Mais à ce moment-là, je m'étais habitué à ne plus fumer et cette punition n'en était plus une pour moi. 还有香烟也是个问题。我进监狱的时候,他们拿去了我的腰带,我的鞋带,我的领带,口袋里所有的东西,特别是我的香烟。一进牢房,我就要求他们还给我。但他们对我说这里禁止吸烟。头几天真难过。也许是这件事使我最为沮丧。我从床板上撕下几块木头来咂一咂。我整天想吐。我不明白,他们为什么不让我抽烟,抽烟并不损害任何人。后来我明白了,这也是惩罚的一部分,但这时候,我对不抽烟已经习惯了,这个惩罚对我已不成其为惩罚了。 A part ces ennuis, je n'étais pas trop malheureux. Toute la question, encore une fois, était de tuer le temps. J'ai fini par ne plus m'ennuyer du tout à partir de l'instant où j'ai appris à me souvenir. Je me mettais quelquefois à penser à ma chambre et, en imagination, je partais d'un coin pour y revenir en dénombrant mentalement tout ce qui se trouvait sur mon chemin. Au début, c'était vite fait. Mais chaque fois que je recommen?ais, c'était un peu plus long. Car je me souvenais de chaque meuble, et, pour chacun d'entre eux, de chaque objet qui s'y trouvait et, pour chaque objet, de tous les détails et pour les détails eux-mêmes, une incrustation, une fêlure ou un bord ébréché, de leur couleur ou de leur grain. En même temps, j'essayais de ne pas perdre le fil de mon inventaire, de faire une énumération complète. Si bien qu'au bout de quelques semaines, je pouvais passer des heures, rien qu'à dénombrer ce qui se trouvait dans ma chambre. Ainsi, plus je réfléchissais et plus de choses méconnues et oubliées je sortais de ma mémoire. J'ai compris alors qu'un homme qui n'aurait vécu qu'un seul jour pourrait sans peine vivre cent ans dans une prison. Il aurait assez de souvenirs pour ne pas s'ennuyer. Dans un sens, c'était un avantage. 除了这些烦恼外,我不算太不幸。全部的问题,我再说一遍,还是如何消磨时间。从我学会了回忆的那个时刻起,我就一点儿也不感到烦闷了。有时候,我想我从前住的房子,在想象中,我从一个角落开始走,再回到原处,心里数着一路上所看到的东西。开始,很快就数完了。但每一次重新开始,就变得稍微长了些。因为我想起了每一件家具,每一件家具上的每一件东西,每一件东西的全部细小的地方,而那些细小的地方本身,还有镶嵌着什么啦,一道裂缝啦,一条有缺口的边啦,还有颜色和木头的纹理啦。同时,我还试图让我这份清单不要断了线,试图把每一件东西都数全。结果,几个星期之后,单单数我房间里的东西,我就能过好几个钟头。这样,我越是想,想出来的原已忘记或根本认不出的东西就越多。于是我明白了,一个人哪怕只生活过一天,也可以毫无困难地在监狱里过上一百年。他会有足够的东西来回忆而不至感到烦闷。从某种意义上说,这也是一种好处。 Il y avait aussi le sommeil. Au début, je dormais mal la nuit et pas du tout le jour. Peu à peu, mes nuits ont été meilleures et j'ai pu dormir aussi le jour. Je peux dire que, dans les derniers mois, je dormais de seize à dix-huit heures par jour. Il me restait alors six heures à tuer avec les repas, les besoins naturels, mes souvenirs et l'histoire du Tchécoslovaque. 还有睡觉。开始,我夜里睡不好,白天根本睡不着。渐渐地,夜里睡得好,白天也能睡着了。我可以说,在最后几个月里,我每天睡十六到十八个钟头。那么,我每天要消磨的时间就剩下六个钟头了,其中包括吃饭、大小便、回忆和捷克斯洛伐克人的故事。 Entre ma paillasse et la planche du lit, j'avais trouvé, en effet, un vieux morceau de journal presque collé à l'étoffe, jauni et transparent. Il relatait un fait divers dont le début manquait, mais qui avait d? se passer en Tchécoslovaquie. Un homme était parti d'un village tchèque pour faire fortune. Au bout de vingt-cinq ans, riche, il était revenu avec une femme et un enfant. Sa mère tenait un h?tel avec sa s?ur dans son village natal. Pour les surprendre, il avait laissé sa femme et son enfant dans un autre établissement, était allé chez sa mère qui ne l'avait pas reconnu quand il était entré. Par plaisanterie, il avait eu l'idée de prendre une chambre. Il avait montré son argent. Dans la nuit, sa mère et sa s?ur l'avaient assassiné à coups de marteau pour le voler et avaient jeté son corps dans la rivière. Le matin, la femme était venue, avait révélé sans le savoir l'identité du voyageur. La mère s'était pendue. La s?ur s'était jetée dans un puits. J'ai d? lire cette histoire des milliers de fois. D'un c?té, elle était invraisemblable. D'un autre, elle était naturelle. De toute fa?on, je trouvais que le voyageur l'avait un peu mérité et qu'il ne faut jamais jouer. 在草褥子和床板之间,有一天我发现了一块旧报纸,几乎粘在布上,已经发黄透亮了。那上面有一则新闻,开头已经没有了,但看得出来事情是发生在捷克斯洛伐克。一个人离开捷克的一个农村,外出谋生。二十五年之后,他发了财,带着老婆和一个孩子回来了。他的母亲和他的妹妹在家乡开了个旅店。为了让她们吃一惊,他把老婆孩子放在另一个地方,自己到了他母亲的旅店里,他进去的时候,她没认出他来。他想开个玩笑,竟租了个房间,并亮出他的钱来。夜里,他母亲和他妹妹用大锤把他打死,偷了他的钱,把尸体扔进河里。第二天早晨,他妻子来了,无意中说出那旅客的姓名。母亲上吊,妹妹投了井。这段故事,我不知读了几千遍。一方面,这事不像真的,另一方面,却又很自然。无论如何,我觉得那个旅客有点自作自受,永远也不应该演戏。 Ainsi, avec les heures de sommeil, les souvenirs, la lecture de mon fait divers et l'alternance de la lumière et de l'ombre, le temps a passé. J'avais bien lu qu'on finissait par perdre la notion du temps en prison. Mais cela n'avait pas beaucoup de sens pour moi. Je n'avais pas compris à quel point les jours pouvaient être à la fois longs et courts. Longs à vivre sans doute, mais tellement distendus qu'ils finissaient par déborder les uns sur les autres. Ils y perdaient leur nom. Les mots hier ou demain étaient les seuls qui gardaient un sens pour moi. 这样,睡觉、回忆、读我的新闻,昼夜交替,时间也就过去了。我在书里读过,说在监狱里,人最后就失去了时间的概念。但是,对我来说,这并没有多大意义。我始终不理解,到什么程度人会感到日子是既长又短的。日子过起来长,这是没有疑问的,但它居然长到一天接一天。它们丧失了各自的名称。对我来说,唯一还有点意义的词是“昨天”和“明天”。 Lorsqu'un jour, le gardien m'a dit que j'étais là depuis cinq mois, je l'ai cru, mais je ne l'ai pas compris. Pour moi, c'était sans cesse le même jour qui déferlait dans ma cellule et la même tache que je poursuivais. Ce jour-là, après le départ du gardien, je me suis regardé dans ma gamelle de fer. Il m'a semblé que mon image restait sérieuse alors même que j'essayais de lui sourire. Je l'ai agitée devant moi. J'ai souri et elle a gardé le même air sévère et triste. Le jour finissait et c'était l'heure dont je ne veux pas parler, l'heure sans nom, où les bruits du soir montaient de tous les étages de la prison dans un cortège de silence. Je me suis approché de la lucarne et, dans la dernière lumière, j'ai contemplé une fois de plus mon image. Elle était toujours sérieuse, et quoi d'étonnant puisque, à ce moment, je l'étais aussi? Mais en même temps et pour la première fois depuis des mois, j'ai entendu distinctement le son de ma voix. Je l'ai reconnue pour celle qui résonnait déjà depuis de longs jours à mes oreilles et j'ai compris que pendant tout ce temps j'avais parlé seul. Je me suis souvenu alors de ce que disait l'infirmière à l'enterrement de maman. Non, il n'y avait pas d'issue et personne ne peut imaginer ce que sont les soirs dans les prisons. 有一天,看守对我说我进来已经五个月了,我相信这点,但我又不理解。对我来说,我在牢房里过的总是同样的一天,做的也总是同样的事。那无,看守走了之后,我对着我的铁碗,看了看自己。我觉得,就是在我试图微笑的时候,我的样子还是很严肃。我晃了晃那铁碗。我微笑了,可碗里的神情还是那么严肃,忧愁。天黑了,这是我不愿意谈到的时刻,无以名之的时刻,监狱各层的牢房里响起了夜晚的嘈杂声,随之而来的是一片寂静。我走近小窗口,借着最后的光亮,我又端详了一番我的样子。还是那么严肃。这有什么奇怪的呢?那会儿,我就是那么严肃嘛。但就在那时,几个月来,我第一次清楚地听见了我自己说话的声音。我认出来了,这就是很久以来一直在我耳边回响的声音啊,我这才明白,这一段时间里我一直在一个人说话。于是,我想起了母亲下葬那天女护士说过的话。不,出路是没有的,没有人能想象监狱里的晚上是怎样的。 3 三 Je peux dire qu'au fond l'été a très vite remplacé l'été. Je savais qu'avec la montée des premières chaleurs surviendrait quelque chose de nouveau pour moi. Mon affaire était inscrite à la dernière session de la cour d'assises et cette session se terminerait avec le mois de juin. Les débats se sont ouverts avec, au-dehors, tout le plein du soleil. Mon avocat m'avait assuré qu'ils ne dureraient pas plus de deux ou trois jours. ?D'ailleurs, avait-il ajouté, la cour sera pressée parce que votre affaire n'est pas la plus importante de la session. Il y a un parricide qui passera tout de suite après.? 我可以说,一个夏天接着一个夏天,其实也快得很。我知道天气刚刚转热,我的事就要有新的动向。我的案子定于重罪法庭最后一次开庭时审理,这次开庭将于六月底结束。辩论的时候,外面太阳火辣辣的。我的律师告诉我辩论不会超过两天或三天。他还说:“再说,法庭忙着呢,您的案子并不是这次最重要的一件。在您之后,立刻就要办一件弑父案。” A sept heures et demie du matin, on est venu me chercher et la voiture cellulaire m'a conduit au Palais de justice. Les deux gendarmes m'ont fait entrer dans une petite pièce qui sentait l'ombre. Nous avons attendu, assis près d'une porte derrière laquelle on entendait des voix, des appels, des bruits de chaises et tout un remue-ménage qui m'a fait penser à ces fêtes de quartier où, après le concert, on range la salle pour pouvoir danser. Les gendarmes m'ont dit qu'il fallait attendre la cour et l'un d'eux m'a offert une cigarette que j'ai refusée. Il m'a demandé peu après ?si j'avais le trac?. J'ai répondu que non. Et même, dans un sens, cela m'intéressait de voir un procès. Je n'en avais jamais eu l'occasion dans ma vie: ?Oui, a dit le second gendarme, mais cela finit par fatiguer.? 早晨七点半,有人来提我,囚车把我送到法院。两名法警把我送进一间小里屋里。我们坐在门旁等着,隔着门,听见一片说话声、叫人的声音和挪动椅子的声音,吵吵嚷嚷地让我想到那些群众性的节日,音乐会之后,大家收抬场地准备跳舞。法警告诉我得等一会儿才开庭,其中一个还递给我一支烟,我拒绝了。过了一会儿,他问我“是不是感到害怕”,我说不害怕。甚至在某种意义上说,看一场官司,我觉得有趣,我有生以来还从没有机会看过呢。“的确,”第二个法警说,“不过看多了也累得慌。” Après un peu de temps, une petite sonnerie a résonné dans la pièce. Ils m'ont alors ?té les menottes. Ils ont ouvert la porte et m'ont fait entrer dans le box des accusés. La salle était pleine à craquer. Malgré les stores, le soleil s'infiltrait par endroits et l'air était déjà étouffant. On avait laissé les vitres closes. Je me suis assis et les gendarmes m'ont encadré. C'est à ce moment que j'ai aper?u une rangée de visages devant moi. Tous me regardaient: j'ai compris que c'étaient les jurés. Mais je ne peux pas dire ce qui les distinguait les uns des autres. Je n'ai eu qu'une impression: j'étais devant une banquette de tramway et tous ces voyageurs anonymes épiaient le nouvel arrivant pour en apercevoir les ridicules. Je sais bien que c'était une idée niaise puisque ici ce n'était pas le ridicule qu'ils cherchaient, mais le crime. Cependant la différence n'est pas grande et c'est en tout cas l'idée qui m'est venue. 不一会儿,房子里一个小电铃响了。他们给我摘下手铐,打开门,让我走到被告席上去。大厅里人坐得满满的。尽管挂着窗帘,有些地方还是有阳光射进来,空气已经闷得不行。窗户都关上了。我坐下,两名法警一边一个。这时,我看见我面前有一排面孔,都在望着我,我明白了,这是陪审员。但我说不出来这些面孔彼此间有什么区别。我只有一个印象,仿佛我在电车上,对面一排座位上的旅客盯着新上来的人,想发现有什么可笑的地方。我知道这种想法很荒唐,因为这里他们要找的不是可笑之处,而是罪恶。不过,区别并不大,反正我是这样想的。 J'étais un peu étourdi aussi par tout ce monde dans cette salle close. J'ai regardé encore le prétoire et je n'ai distingué aucun visage. Je crois bien que d'abord je ne m'étais pas rendu compte que tout ce monde se pressait pour me voir. D'habitude, les gens ne s'occupaient pas de ma personne. Il m'a fallu un effort pour comprendre que j'étais la cause de toute cette agitation. J'ai dit au gendarme: ?Que de monde!? Il m'a répondu que c'était à cause des journaux et il m'a montré un groupe qui se tenait près d'une table sous le banc des jurés. Il m'a dit: ?Les voilà.? J'ai demandé: ?Qui?? et il a répété: ?Les journaux.? Il connaissait l'un des journalistes qui l'a vu à ce moment et qui s'est dirigé vers nous. C'était un homme déjà agé, sympathique, avec un visage un peu grima?ant. Il a serré la main du gendarme avec beaucoup de chaleur. J'ai remarqué à ce moment que tout le monde se rencontrait, s'interpellait et conversait, comme dans un club où l'on est heureux de se retrouver entre gens du même monde. Je me suis expliqué aussi la bizarre impression que j'avais d'être de trop, un peu comme un intrus. Pourtant, le journaliste s'est adressé à moi en souriant. Il m'a dit qu'il espérait que tout irait bien pour moi. Je l'ai remercié et il a ajouté: ?Vous savez, nous avons monté un peu votre affaire. L'été, c'est la saison creuse pour les journaux. Et il n'y avait que votre histoire et celle du parricide qui vaillent quelque chose.? Il m'a montré ensuite, dans le groupe qu'il venait de quitter, un petit bonhomme qui ressemblait à une belette engraissée, avec d'énormes lunettes cerclées de noir. Il m'a dit que c'était l'envoyé spécial d'un journal de Paris: ?Il n'est pas venu pour vous, d'ailleurs. Mais comme il est chargé de rendre compte du procès du parricide, on lui a demandé de cabler votre affaire en même temps.? Là encore, j'ai failli le remercier. Mais j'ai pensé que ce serait ridicule. Il m'a fait un petit signe cordial de la main et nous a quittés. Nous avons encore attendu quelques minutes. 还有,门窗紧闭的大厅里这么多人也使我头昏脑涨。我又看了看法庭上,还是一张脸也看不清。我认为,首先是我没料到大家都急着想看看我。平时,谁也不注意我这个人。今天,我得费一番力气才明白我是这一片骚动的起因。我对法警说:“这么多人!”他回答我说这是因为报纸,他指给我坐在陪审员座位下面桌子旁边的一群人,说:“他们在那儿。”我问:“谁?”他说:“报馆的人呀。”他认识其中的一个记者,那人这时也看见了他,并朝我们走过来。这人年纪已经不小了,样子倒也和善,只是脸长得有点滑稽。他很亲热地握了握法警的手。我这时注意到大家都在握手,打招呼,谈话,好像在俱乐部里碰到同一个圈子里的人那样高兴。我明白了为什么我刚才会有那么奇怪的感觉,仿佛我是个多余的人,是个擅自闯入的家伙。但是,那个记者微笑着跟我说话了,希望我一切顺利。我谢了他,他又说:“您知道,我们有点儿夸大了您的案子。夏天,对报纸来说是个淡季。只有您的事和那宗弑父案还有点儿什么。”他接着指给我看他刚离开的那群人中的一个矮个子,那人像只肥胖的鼬,带着一副黑边大眼镜。他说那是巴黎一家报纸的特派记者:“不过,他不是为您来的。因为他来报道那宗弑父案,人家也就要他同时把您的案子一道发回去。”说到这儿,我又差点儿要感谢他。但我想这将是很可笑的。他举手向我亲切地摆了摆,离开了我们。我们又等了几分钟。 Mon avocat est arrivé, en robe, entouré de beaucoup d'autres confrères. Il est allé vers les journalistes, a serré des mains. Ils ont plaisanté, ri et avaient l'air tout à fait à leur aise, jusqu'au moment où la sonnerie a retenti dans le prétoire. Tout le monde a regagné sa place. Mon avocat est venu vers moi, m'a serré la main et m'a conseillé de répondre brièvement aux questions qu'on me poserait, de ne pas prendre d'initiatives et de me reposer sur lui pour le reste. 我的律师到了。他穿着法衣,周围还有许多同行。他朝记者们走去,跟他们握了握手。他们打趣,大笑,显得非常自如,直到法庭上铃响为止。大家各就各位。我的律师朝我走来,跟我握手,嘱咐我回答问题要简短,不要主动说话,剩下的就由他办了。 A ma gauche, j'ai entendu le bruit d'une chaise qu'on reculait et j'ai vu un grand homme mince, vêtu de rouge, portant lorgnon, qui s'asseyait en pliant sa robe avec soin. C'était le procureur. Un huissier a annoncé la cour. Au même moment, deux gros ventilateurs ont commencé de vrombir. Trois juges, deux en noir, le troisième en rouge, sont entrés avec des dossiers et ont marché très vite vers la tribune qui dominait la salle. L'homme en robe rouge s'est assis sur le fauteuil du milieu, a posé sa toque devant lui, essuyé son petit crane chauve avec un mouchoir et déclaré que l'audience était ouverte. 左边,我听见有挪椅子的声音,我看见一个身材细高的人,穿着红色法衣,戴着夹鼻眼镜,仔细地折起长袍坐下了。这是检察官。执达吏宣布开庭。同时,两个大电扇一齐嗡嗡地响起来。三个推事,两个着黑衣,一个着红衣,夹着卷宗进来,很快地朝俯视着大厅的高台走去。着红衣的那个人坐在中间的椅子上,把帽子放在身前,用手帕擦了擦小小的秃顶,宣布审讯开始。 Les journalistes tenaient déjà leur stylo en main. Ils avaient tous le même air indifférent et un peu narquois. Pourtant, l'un d'entre eux, beaucoup plus jeune, habillé en flanelle grise avec une cravate bleue, avait laissé son stylo devant lui et me regardait. Dans son visage un peu asymétrique, je ne voyais que ses deux yeux, très clairs, qui m'examinaient attentivement, sans rien exprimer qui f?t définissable. Et j'ai eu l'impression bizarre d'être regardé par moi-même. C'est peut-être pour cela, et aussi parce que je ne connaissais pas les usages du lieu, que je n'ai pas très bien compris tout ce qui s'est passé ensuite, le tirage au sort des jurés, les questions posées par le président à l'avocat, au procureur et au jury (à chaque fois, toutes les têtes des jurés se retournaient en même temps vers la cour), une lecture rapide de l'acte d'accusation, où je reconnaissais des noms de lieux et de personnes, et de nouvelles questions à mon avocat. 记者们已经拿起了钢笔。他们都漠不关心,有点傻乎乎的样子。然而,其中有一个,年纪轻得多,穿一身灰法兰绒衣服,系着蓝色的领带。他把笔放在前面,望着我。在那张不大匀称的脸上,我只看见两只淡淡的眼睛,专心地端详着我,表情不可捉摸。而我有一种奇怪的印象,好像是我自己看着我自己。也许是因为这一点,当然也因为我不知道这种场合的规矩,我对后来发生的事都没怎么搞清楚,例如陪审员抽签,庭长向律师,向检察官和向陪审团提问(每一次,所有的陪审员的脑袋都同时转向法官),很快地念起诉书(我听出了一些地名和人名),然后再向我的律师提问。 Mais le président a dit qu'il allait faire procéder à l'appel des témoins. L'huissier a lu des noms qui ont attiré mon attention. Du sein de ce public tout à l'heure informe, j'ai vu se lever un à un, pour dispara?tre ensuite par une porte latérale, le directeur et le concierge de l'asile, le vieux Thomas Ferez, Raymond, Masson, Salamano, Marie. Celle-ci m'a fait un petit signe anxieux. Je m'étonnais encore de ne pas les avoir aper?us plus t?t, lorsque à l'appel de son nom, le dernier, Céleste, s'est levé. J'ai reconnu à c?té de lui la petite bonne femme du restaurant, avec sa jaquette et son air précis et décidé. Elle me regardait avec intensité. Mais je n'ai pas eu le temps de réfléchir parce que le président a pris la parole. Il a dit que les véritables débats allaient commencer et qu'il croyait inutile de recommander au public d'être calme. Selon lui, il était là pour diriger avec impartialité les débats d'une affaire qu'il voulait considérer avec objectivité. La sentence rendue par le jury serait prise dans un esprit de justice et, dans tous les cas, il ferait évacuer la salle au moindre incident. 庭长说应该传讯证人了。执达吏念了一些姓名,引起了我的注意。在这群我刚才没看清楚的人当中,我看见几个人一个个站起来,从旁门走出去,他们是养老院的院长和门房,老多玛?贝莱兹,莱蒙,马松,萨拉玛诺,玛丽。玛丽还焦虑不安地看了看我。我还在奇怪怎么没有早些看见他们,赛莱斯特最后听到他的名字,站了起来。在他身边,我认出了在饭馆见过的那个小女人,她还穿着那件短外套,一副坚定不移,一丝不苟的神气。她紧紧地盯着我。但是我没有时间多考虑,因为庭长讲话了。他说真正的辩论就要开始了,他相信无须再要求听众保持安静。据他说,他的职责是不偏不倚地引导有关一宗他要客观对待的案子的辩论。陪审团提出的判决将根据公正的精神作出,在任何情况下,如有哪怕最微不足道的捣乱的情况,他都要把听众逐出法庭。 La chaleur montait et je voyais dans la salle les assistants s'éventer avec des journaux. Cela faisait un petit bruit continu de papier froissé. Le président a fait un signe et l'huissier a apporté trois éventails de paille tressée que les trois juges ont utilisés immédiatement. 大厅里越来越热,我看见推事们都拿报纸扇了起来,立刻响起一阵持续的哗啦哗啦的纸声。庭长示意,执达吏送来三把草蒲扇,三位推事马上使用起来。 Mon interrogatoire a commencé aussit?t. Le président m'a questionné avec calme et même, m'a-t-il semblé, avec une nuance de cordialité. On m'a encore fait décliner mon identité et malgré mon agacement, j'ai pensé qu'au fond c'était assez naturel, parce qu'il serait trop grave de juger un homme pour un autre. Puis le président a recommencé le récit de ce que j'avais fait, en s'adressant à moi toutes les trois phrases pour me demander: ?Est-ce bien cela?? A chaque fois, j'ai répondu: ?Oui, monsieur le Président?, selon les instructions de mon avocat. Cela a été long parce que le président apportait beaucoup de minutie dans son récit. Pendant tout ce temps, les journalistes écrivaient. Je sentais les regards du plus jeune d'entre eux et de la petite automate. La banquette de tramway était tout entière tournée vers le président. Celui-ci a toussé, feuilleté son dossier et il s'est tourné vers moi en s'éventant. 审讯立刻开始。庭长心平气和地,我觉得甚至是带着一些亲切感地向我发问。不管我多么厌烦,他还是先让我自报家门,我想这也的确是相当自然的,万一把一个人当成另一个人,那可就太严重了。然后,庭长又开始叙述我做过的事情,每读三句话就问我一声:“是这样吗?”每一次,我都根据律师的指示回答道:“是,庭长先生。”这持续了很久,因为庭长叙述得很细。这时候,记者们一直在写。我感到了他们当中最年轻的那个和那个小自动机器的目光。电车板凳上的那一排人都面向着庭长。庭长咳嗽一声,翻翻材料,一边扇着扇子,一边转向我。 Il m'a dit qu'il devait aborder maintenant des questions apparemment étrangères à mon affaire, mais qui peut-être la touchaient de fort près. J'ai compris qu'il allait encore parler de maman et j'ai senti en même temps combien cela m'ennuyait. Il m'a demandé pourquoi j'avais mis maman à l'asile. J'ai répondu que c'était parce que je manquais d'argent pour la faire garder et soigner. Il m'a demandé si cela m'avait co?té personnellement et j'ai répondu que ni maman ni moi n'attendions plus rien l'un de l'autre, ni d'ailleurs de personne, et que nous nous étions habitués tous les deux à nos vies nouvelles. Le président a dit alors qu'il ne voulait pas insister sur ce point et il a demandé au procureur s'il ne voyait pas d'autre question à me poser. 他说他现在要提出几个与我的案子表面上没有关系而实际上可能大有关系的问题。我知道他又要谈妈妈了,我感到我是多么厌烦。他问我为什么把妈妈送进养老院。我回答说我没有钱请人照看她,给她看病。他问我,就个人而言,这是否使我很难受,我回答说无论是妈妈,还是我,都不需要从对方得到什么,再说也不需要从任何人那里得到什么,我们俩都习惯了新的生活。于是,庭长说他并不想强调这一点,他问检察官是否有别的问题向我提出。 Celui-ci me tournait à demi le dos et, sans me regarder, il a déclaré qu'avec l'autorisation du président, il aimerait savoir si j'étais retourné vers la source tout seul avec l'intention de tuer l'Arabe. ?Non?, ai-je dit. ?Alors, pourquoi était-il armé et pourquoi revenir vers cet endroit précisément?? J'ai dit que c'était le hasard. Et le procureur a noté avec un accent mauvais: ?Ce sera tout pour le moment.? Tout ensuite a été un peu confus, du moins pour moi. Mais après quelques conciliabules, le président a déclaré que l'audience était levée et renvoyée à l'après-midi pour l'audition des témoins. 这一位半转过脊背对着我,并不看我,说如果庭长允许,他想知道我是不是怀着杀死阿拉伯人的意图独自回到水泉那里。“不是,”我说。“那么,您为什么带着武器,又单单回到这个地方去呢?”我说这是偶然的。检察官以一种阴险的口吻说:“暂时就是这些。”接下来的事就有点不清楚了,至少对我来说是如此。但是,经过一番秘密磋商之后,庭长宣布休庭,听取证词改在下午进行。 Je n'ai pas eu le temps de réfléchir. On m'a emmené, fait monter dans la voiture cellulaire et conduit à la prison où j'ai mangé. Au bout de très peu de temps, juste assez pour me rendre compte que j'étais fatigué, on est revenu me chercher; tout a recommencé et je me suis trouvé dans la même salle, devant les mêmes visages. Seulement la chaleur était beaucoup plus forte et comme par un miracle chacun des jurés, le procureur, mon avocat et quelques journalistes étaient munis aussi d'éventails de paille. Le jeune journaliste et la petite femme étaient toujours là. Mais ils ne s'éventaient pas et me regardaient encore sans rien dire. 我没有时间思考。他们把我带走,装进囚车,送回监狱吃饭。很快,在我刚感到累时,就有人来提我了。一切又重来一遍,我被送到同一个大厅里,我面前还是那些面孔。只是大厅里更热了,仿佛奇迹一般,陪审员、检察官、我的律师和几个记者,人人手中都拿了一把蒲扇。那个年轻的记者和那个小女人还在那儿。但他们不扇扇子,默默地望着我。 J'ai essuyé la sueur qui couvrait mon visage et je n'ai repris un peu conscience du lieu et de moi-même que lorsque j'ai entendu appeler le directeur de l'asile. On lui a demandé si maman se plaignait de moi et il a dit que oui mais que c'était un peu la manie de ses pensionnaires de se plaindre de leurs proches. Le président lui a fait préciser si elle me reprochait de l'avoir mise à l'asile et le directeur a dit encore oui. Mais cette fois, il n'a rien ajouté. A une autre question, il a répondu qu'il avait été surpris de mon calme le jour de l'enterrement. On lui a demandé ce qu'il entendait par calme. Le directeur a regardé alors le bout de ses souliers et il a dit que je n'avais pas voulu voir maman, je n'avais pas pleuré une seule fois et j'étais parti aussit?t après l'enterrement sans me recueillir sur sa tombe. Une chose encore l'avait surpris: un employé des pompes funèbres lui avait dit que je ne savais pas l'age de maman. Il y a eu un moment de silence et le président lui a demandé si c'était bien de moi qu'il avait parlé. Comme le directeur ne comprenait pas la question, il lui a dit: ?C'est la loi.? Puis le président a demandé à l'avocat général s'il n'avait pas de question à poser au témoin et le procureur s'est écrié: ?Oh ! non, cela suffit?, avec un tel éclat et un tel regard triomphant dans ma direction que, pour la première fois depuis bien des années, j'ai eu une envie stupide de pleurer parce que j'ai senti combien j'étais détesté par tous ces gens-là. 我擦了擦脸上的汗,直到我听见传养老院院长,这才略微意识到了我所在的地方和我自己。他们问他妈妈是不是埋怨我,他说是的,不过院里的老人埋怨亲人差不多是一种通病。庭长让他明确妈妈是否怪我把她送进养老院,他又说是的。但这一次,他没有补充什么。对另一个问题,他回答说他对我在下葬那天所表现出的冷静感到惊讶。这时,院长看了看他的鞋尖儿,说我不想看看妈妈,没哭过一次,下葬后立刻就走,没有在她坟前默哀。还有一件使他惊讶的事,就是殡仪馆的一个人跟他说我不知道妈妈的年龄。大厅里一片寂静,庭长问他说的是否的确是我。院长没有听懂这个问题,说道:“这是法律。”然后,庭长问检察官有没有问题向证人提出,检察官大声说道:“噢!没有了,已经足够了。”他的声音这样响亮,他带着这样一种得意洋洋的目光望着我,使我多年来第一次产生了愚蠢的想哭的愿望,因为我感到这些人是多么地憎恨我。 Après avoir demandé au jury et à mon avocat s'ils avaient des questions à poser, le président a entendu le concierge. Pour lui comme pour tous les autres, le même cérémonial s'est répété. En arrivant, le concierge m'a regardé et il a détourné les yeux. Il a répondu aux questions qu'on lui posait. Il a dit que je n'avais pas voulu voir maman, que j'avais fumé, que j'avais dormi et que j'avais pris du café au lait. J'ai senti alors quelque chose qui soulevait toute la salle et, pour la première fois, j'ai compris que j'étais coupable. On a fait répéter au concierge l'histoire du café au lait et celle de la cigarette. L'avocat général m'a regardé avec une lueur ironique dans les yeux. A ce moment, mon avocat a demandé au concierge s'il n'avait pas fumé avec moi. Mais le procureur s'est élevé avec violence contre cette question: ?Quel est le criminel ici et quelles sont ces méthodes qui consistent à salir les témoins de l'accusation pour minimiser des témoignages qui n'en demeurent pas moins écrasants!? Malgré tout, le président a demandé au concierge de répondre à la question. Le vieux a dit d'un air embarrassé: ?Je sais bien que j'ai eu tort. Mais je n'ai pas osé refuser la cigarette que Monsieur m'a offerte.? En dernier lieu, on m'a demandé si je n'avais rien à ajouter. ?Rien, ai-je répondu, seulement que le témoin a raison. Il est vrai que je lui ai offert une cigarette.? Le concierge m'a regardé alors avec un peu d'étonnement et une sorte de gratitude. Il a hésité, puis il a dit que c'était lui qui m'avait offert le café au lait. Mon avocat a triomphé bruyamment et a déclaré que les jurés apprécieraient. Mais le procureur a tonné au-dessus de nos têtes et il a dit: ?Oui, MM. les Jurés apprécieront. Et ils concluront qu'un étranger pouvait proposer du café, mais qu'un fils devait le refuser devant le corps de celle qui lui avait donné le jour.? Le concierge a regagné son banc. 问过陪审团和我的律师有没有问题之后,庭长听了门房的证词。门房和其他人一样,也重复了同样的仪式。他走到我跟前看了我一眼,就转过脸去了。他回答了他们提出的问题。他说我不想看看妈妈,却抽烟,睡觉,还喝了牛奶咖啡。这时,我感到有什么东西激怒了整个大厅里的人,我第一次认识到我是有罪的。他们又让门房把喝牛奶咖啡和抽烟的事情重复一遍。检察官看了看我,眼睛里闪着一种嘲讽的光亮。这时,我的律师问门房是否和我一道抽烟了。可是检察官猛地站起来,反对这个问题:“这里究竟谁是罪犯?这种为了减弱证词的力量而反诬证人的作法究竟是什么作法?但是,证词并不因此而减少其不可抵抗的力量!”尽管如此,庭长还是让门房回答这个问题。老头子很难为情地说:“我知道我也不对,但是我当时没敢拒绝先生给我的香烟。”最后,他们问我有没有什么要补充的。我说:“没有,只是证人说得对。我的确给了他一支香烟。”这时,门房既有点儿惊奇又怀着某种感激的心情看了看我。他迟疑了一下,说牛奶咖啡是他请我喝的。我的律师得意地叫了起来,说陪审员们一定会重视这一点的。但是检察官在我们头上发出雷鸣般的声音,说道:“对,陪审员先生们会重视的。而他们的结论将是,一个外人可以请喝咖啡,而一个儿子,面对着生了他的那个人的尸体,就应该拒绝。”门房回到他的座位上去。 Quand est venu le tour de Thomas Ferez, un huissier a d? le soutenir jusqu'à la barre. Ferez a dit qu'il avait surtout connu ma mère et qu'il ne m'avait vu qu'une fois, le jour de l'enterrement. On lui a demandé ce que j'avais fait ce jour-là et il a répondu: ?Vous comprenez, moi-même j'avais trop de peine. Alors, je n'ai rien vu. C'était la peine qui m'empêchait de voir. Parce que c'était pour moi une très grosse peine. Et même, je me suis évanoui. Alors, je n'ai pas pu voir Monsieur.? L'avocat général lui a demandé si, du moins, il m'avait vu pleurer. Ferez a répondu que non. Le procureur a dit alors à son tour: ?MM. les Jurés apprécieront.? Mais mon avocat s'est faché. Il a demandé à Ferez, sur un ton qui m'a semblé exagéré, ?s'il avait vu que je ne pleurais pas?. Ferez a dit: ?Non.? Le public a ri. Et mon avocat, en retroussant une de ses manches, a dit d'un ton péremptoire: ?Voilà l'image de ce procès. Tout est vrai et rien n'est vrai!? Le procureur avait le visage fermé et piquait un crayon dans les titres de ses dossiers. 轮到多玛?贝莱兹了,一个执达吏把他扶到证人席上。贝莱兹说他主要是认识我母亲,他只在下葬的那一天见过我一次。他们问他我那天干了些什么,他回答道:“你们明白,我自己当时太难过了。所以,我什么也没看见。痛苦使我什么也看不见。因为对我来说,这是非常大的痛苦。我甚至都晕倒了。所以,我不能看见先生做了些什么。”检察官问他,是不是至少看见过我哭。贝莱兹说没看见。于是,检察官也说:“陪审员先生们会重视这一点的。”但我的律师生气了。他用一种我觉得过火的口吻问贝莱兹。他是否看见我不哭。贝莱兹说:“没看见。”一阵哄堂大笑。我的律师卷起一只袖子,以一种不容争辩的口吻说道:“请看,这就是这场官司的形象。一切都是真的,又没有什么是真的!”检察官沉下脸来,居心叵测,用铅笔在档案材料的标题上戳着。 Après cinq minutes de suspension pendant lesquelles mon avocat m'a dit que tout allait pour le mieux, on a entendu Céleste qui était cité par la défense. La défense, c'était moi. Céleste jetait de temps en temps des regards de mon c?té et roulait un panama entre ses mains. Il portait le costume neuf qu'il mettait pour venir avec moi, certains dimanches, aux courses de chevaux. Mais je crois qu'il n'avait pas pu mettre son col parce qu'il portait seulement un bouton de cuivre pour tenir sa chemise fermée. On lui a demandé si j'étais son client et il a dit: ?Oui, mais c'était aussi un ami? ; ce qu'il pensait de moi et il a répondu que j'étais un homme; ce qu'il entendait par là et il a déclaré que tout le monde savait ce que cela voulait dire ; s'il avait remarqué que j'étais renfermé et il a reconnu seulement que je ne parlais pas pour ne rien dire. L'avocat général lui a demandé si je payais régulièrement ma pension. Céleste a ri et il a déclaré: ?C'étaient des détails entre nous.? On lui a demandé encore ce qu'il pensait de mon crime. Il a mis alors ses mains sur la barre et l'on voyait qu'il avait préparé quelque chose. Il a dit: ?Pour moi, c'est un malheur. Un malheur, tout le monde sait ce que c'est. ?a vous laisse sans défense. Eh bien! pour moi c'est un malheur.? Il allait continuer, mais le président lui a dit que c'était bien et qu'on le remerciait. Alors Céleste est resté un peu interdit. Mais il a déclaré qu'il voulait encore parler. On lui a demandé d'être bref. Il a encore répété que c'était un malheur. Et le président lui a dit: ?Oui, c'est entendu. Mais nous sommes là pour juger les malheurs de ce genre. Nous vous remercions.? Comme s'il était arrivé au bout de sa science et de sa bonne volonté, Céleste s'est alors retourné vers moi. Il m'a semblé que ses yeux brillaient et que ses lèvres tremblaient. Il avait l'air de me demander ce qu'il pouvait encore faire. Moi, je n'ai rien dit, je n'ai fait aucun geste, mais c'est la première fois de ma vie que j'ai eu envie d'embrasser un homme. Le président lui a encore enjoint de quitter la barre. Céleste est allé s'asseoir dans le prétoire. Pendant tout le reste de l'audience, il est resté là, un peu penché en avant, les coudes sur les genoux, le panama entre les mains, à écouter tout ce qui se disait. Marie est entrée. Elle avait mis un chapeau et elle était encore belle. Mais je l'aimais mieux avec ses cheveux libres. De l'endroit où j'étais, je devinais le poids léger de ses seins et je reconnaissais sa lèvre inférieure toujours un peu gonflée. Elle semblait très nerveuse. Tout de suite, on lui a demandé depuis quand elle me connaissait. Elle a indiqué l'époque où elle travaillait chez nous. Le président a voulu savoir quels étaient ses rapports avec moi. Elle a dit qu'elle était mon amie. A une autre question, elle a répondu qu'il était vrai qu'elle devait m'épouser. Le procureur qui feuilletait un dossier lui a demandé brusquement de quand datait notre liaison. Elle a indiqué la date. Le procureur a remarqué d'un air indifférent qu'il lui semblait que c'était le lendemain de la mort de maman. Puis il a dit avec quelque ironie qu'il ne voudrait pas insister sur une situation délicate, qu'il comprenait bien les scrupules de Marie, mais (et ici son accent s'est fait plus dur) que son devoir lui commandait de s'élever au-dessus des convenances. Il a donc demandé à Marie de résumer cette journée où je l'avais connue. Marie ne voulait pas parler, mais devant l'insistance du procureur, elle a dit notre bain, notre sortie au cinéma et notre rentrée chez moi. L'avocat général a dit qu'à la suite des déclarations de Marie à l'instruction, il avait consulté les programmes de cette date. Il a ajouté que Marie elle-même dirait quel film on passait alors. D'une voix presque blanche, en effet, elle a indiqué que c'était un film de Fernandel. Le silence était complet dans la salle quand elle a eu fini. Le procureur s'est alors levé, très grave et d'une voix que j'ai trouvée vraiment émue, le doigt tendu vers moi, il a articulé lentement: ?Messieurs les Jurés, le lendemain de la mort de sa mère, cet homme prenait des bains, commen?ait une liaison irrégulière, et allait rire devant un film comique. Je n'ai rien de plus à vous dire.? II s'est assis, toujours dans le silence. Mais, tout d'un coup, Marie a éclaté en sanglots, a dit que ce n'était pas cela, qu'il y avait autre chose, qu'on la for?ait à dire le contraire de ce qu'elle pensait, qu'elle me connaissait bien et que je n'avais rien fait de mal. Mais l'huissier, sur un signe du président, l'a emmenée et l'audience s'est poursuivie. 在审讯暂停的五分钟里,我的律师对我说一切都进行得再好不过,然后,他们听了赛莱斯特的辩护,他是由被告方面传来的。所谓被告,当然就是我了。赛莱斯特不时地朝我这边望望,手里摆弄着一顶巴拿马草帽。他穿着一身新衣服,那是他有几个星期天跟我一起去看赛马时穿的。但是我现在认为他那时没有戴硬领,因为他领口上只扣着一枚铜纽扣。他们问他我是不是他的顾客,他说:“是,但也是一个朋友。”问到他对我的看法,他说我是个男子汉。问他这是什么意思,他说谁都知道那是什么意思。问他是否注意到我是个缄默孤僻的人,他只承认我不说废话。检察官问他我是不是按时付钱,他笑了,说:“这是我们两个人之间的私事。”他们又问他对我的罪行有什么看法。这时,他把手放在栏杆上,看得出来他是有所准备的。他说:“依我看,这是件不幸的事。谁都知道不幸是什么。这使你没法抗拒。因此,依我看,这是件不幸的事。”他还要继续说,但庭长说这很好,谢谢他。赛莱斯特有点儿愣了。但是他说他还有话。他们让他说得简短些。他又重复了一遍说这是件不幸的事。庭长说:“是啊,这是当然。我们在这儿就是为了判断这一类的不幸。谢谢您。”仿佛他已尽其所能并表现了他的好意,他就朝我转过身来。我觉得他的眼睛发亮,嘴唇哆嗦着。他好像是问我他还能做些什么。我呢,我什么也没说,我没有任何表示,但是,我有生以来第一次想拥抱一个男人。庭长又一次请他离开辩护席。赛莱斯特这才回到旁听席上去。在剩下的时间里,他一直待在那里,身子稍稍前倾,两肘支在膝头上,手里拿着草帽,听着大家说话。玛丽进来了。她带着帽子,还是那么美。但是我喜欢她披散着头发。从我坐的地方,我可以感觉到她轻盈的乳房,看得出她的下嘴唇总是有点儿发肿。她好像很紧张。一上来,人家就问她从什么时起和我认识。她说是从她在我们公司做事的时候起。庭长想知道她和我是什么关系。她说她是我的朋友。在回答另一个问题时,她说她的确要和我结婚。检察官翻了翻一卷材料,突然问她是什么时候和我发生关系的。她说了个日子。检察官以一种漠不关心的神气指出,那似乎是妈妈死后的第二天。然后,他又颇含讥讽地说他不想强调一种微妙的处境,他很理解玛丽的顾虑,但是(说到这里,他的口气强硬了),他的职责使他不能不越过通常的礼仪。因此,他要求玛丽讲一讲我碰见她的那一天的情况。玛丽不愿意说,但在检察官的坚持下,她讲了我们游泳,看电影,然后回到我那里去。检察官说,根据玛丽在预审中所提供的情况,他查阅了那一天的电影片目。他要玛丽自己说那一天放的是什么电影。她的声音都变了,说那是一部费南代尔的片子。她说完,大厅里鸦雀无声。这时,检察官站起来,神情非常庄重,伸出手指着我,用一种我认为的确是很激动的声音,一个字一个字地慢慢说道:“陪审员先生们,这个人在他母亲死去的第二天,就去游泳,就开始搞不正当的关系,就去看滑稽影片开怀大笑。至于别的,我就用不着多说了。”他坐下了,大厅里还是一片寂静。忽然,玛丽大哭起来,说情况不是这样,还有别的,刚才的话不是她心里想的,是人家逼她说的,她很了解我,我没做过任何坏事。但是执达吏在庭长的示意下把她拖了出去。审讯继续。 C'est à peine si, ensuite, on a écouté Masson qui a déclaré que j'étais un honnête homme ?et qu'il dirait plus, j'étais un brave homme?. C'est à peine encore si on a écouté Salamano quand il a rappelé que j'avais été bon pour son chien et quand il a répondu à une question sur ma mère et sur moi en disant que je n'avais plus rien à dire à maman et que je l'avais mise pour cette raison à l'asile. ?Il faut comprendre, disait Salamano, il faut comprendre.? Mais personne ne paraissait comprendre. On l'a emmené. 紧接着是马松说话,人们都不怎么听了,他说我是个正经人,他“甚至还要说,是个老实人”。至于萨拉玛诺,就更没有人听了。他说我对他的狗很好。当问到关于我母亲和我的时候,他说我跟妈妈无话可说,所以我才把妈妈送进养老院。他说:“应该理解呀,应该理解呀。’可是似乎没有一个人理解。他被带了出去。 Puis est venu le tour de Raymond, qui était le dernier témoin. Raymond m'a fait un petit signe et a dit tout de suite que j'étais innocent. Mais le président a déclaré qu'on ne lui demandait pas des appréciations, mais des faits. Il l'a invité à attendre des questions pour répondre. On lui a fait préciser ses relations avec la victime. Raymond en a profité pour dire que c'était lui que cette dernière ha?ssait depuis qu'il avait giflé sa s?ur. Le président lui a demandé cependant si la victime n'avait pas de raison de me ha?r. Raymond a dit que ma présence à la plage était le résultat d'un hasard. Le procureur lui a demandé alors comment il se faisait que la lettre qui était à l'origine du drame avait été écrite par moi. Raymond a répondu que c'était un hasard. Le procureur a rétorqué que le hasard avait déjà beaucoup de méfaits sur la conscience dans cette histoire. Il a voulu savoir si c'était par hasard que je n'étais pas intervenu quand Raymond avait giflé sa ma?tresse, par hasard que j'avais servi de témoin au commissariat, par hasard encore que mes déclarations lors de ce témoignage s'étaient révélées de pure complaisance. Pour finir, il a demandé à Raymond quels étaient ses moyens d'existence, et comme ce dernier répondait : ?Magasinier?, l'avocat général a déclaré aux jurés que de notoriété générale le témoin exer?ait le métier de souteneur. J'étais son complice et son ami. Il s'agissait d'un drame crapuleux de la plus basse espèce, aggravé du fait qu'on avait affaire à un monstre moral. Raymond a voulu se défendre et mon avocat a protesté, mais on leur a dit qu'il fallait laisser terminer le procureur. Celui-ci a dit: ?J'ai peu de chose à ajouter. Etait-il votre ami?? a-t-il demandé à Raymond. ?Oui, a dit celui-ci, c'était mon copain.? L'avocat général m'a posé alors la même question et j'ai regardé Raymond qui n'a pas détourné les yeux. J'ai répondu: ?Oui.? Le procureur s'est alors retourné vers le jury et a déclaré: ?Le même homme qui au lendemain de la mort de sa mère se livrait à la débauche la plus honteuse a tué pour des raisons futiles et pour liquider une affaire de m?urs inqualifiable.? 轮到莱蒙了,他是最后一个证人。莱蒙朝我点点头,立刻说道我是无罪的。但是,庭长说法庭要的不是判断而是证据。他要他先等着提问,然后再回答。他们要他明确他和被害人的关系。莱蒙趁此机会说被害人恨的是他,因为他羞辱了他姐姐。但庭长问他被害人是否就没有理由恨我。莱蒙说我到海滩上去完全是出于偶然。检察官问他作为悲剧的根源的那封信怎么会是我写的。莱蒙说那是出于偶然。检察官反驳说偶然在这宗案子里对人的良心所产生的坏作用已经不少了。他想知道,当莱蒙羞辱他的情妇时,我没有干涉,这是不是出于偶然;我到警察局去作证,是不是出于偶然;我在作证时说的话纯粹是献殷勤,是不是也出于偶然。最后,他问莱蒙靠什么生活,莱蒙说是“仓库管理员”。检察官朝着陪审员们说道,众所周知,证人干的是乌龟的行当。我是他的同谋和朋友。这是一个最下流的无耻事件,由于加进了一个道德上的魔鬼而变得更加严重。莱蒙要声辩,我的律师也提出抗议,但是人家要他们让检察官说完。他说:“我的话不多了。他是您的朋友吗?”他问莱蒙。莱蒙说:“是,他是我的朋友。”检察官又向我提出同一个问题,我看了看莱蒙,他也正看着我。我说:“是。”检察官于是转向陪审团,说道:“还是这个人,他在母亲死后的第二天就去干最荒淫无耻的勾当,为了了结一桩卑鄙的桃色事件就去随随便便地杀人!” Il s'est assis alors. Mais mon avocat, à bout de patience s'est écrié en levant les bras, de sorte que ses manches en retombant ont découvert les plis d'une chemise amidonnée: ?Enfin, est-il accusé d'avoir enterré sa mère ou d'avoir tué un homme?? Le public a ri. Mais le procureur s'est redressé encore, s'est drapé dans sa robe et a déclaré qu'il fallait avoir l'ingénuité de l'honorable défenseur pour ne pas sentir qu'il y avait entre ces deux ordres de faits une relation profonde, pathétique, essentielle. ?Oui, s'est-il écrié avec force, j'accuse cet homme d'avoir enterré une mère avec un c?ur de criminel.? Cette déclaration a paru faire un effet considérable sur le public. Mon avocat a haussé les épaules et essuyé la sueur qui couvrait son front. Mais lui-même paraissait ébranlé et j'ai compris que les choses n'allaient pas bien pour moi. 他坐下了。我的律师已经按捺不住,只见他举起胳膊,法衣的袖子都落了下来,露出了里面浆得雪白的衬衫,大声嚷道:“说来说去,他被控埋了母亲还是被控杀了人?”听众一阵大笑。但检察官又站了起来,披了披法衣,说道需要有这位可敬的辩护人那样的聪明才智才能不感到在这两件事之间有一种深刻的、感人的、本质的关系。他用力地喊道:“是的,我控告这个人怀着一颗杀人犯的心埋葬了一位母亲。”这句话似乎在听众里产生了很大的效果。我的律师耸了耸肩,擦了擦额上的汗水。但他本人似乎也受到了震动,我明白我的事情不妙了。 L'audience a été levée. En sortant du Palais de justice pour monter dans la voiture, j'ai reconnu un court instant l'odeur et la couleur du soir d'été. Dans l'obscurité de ma prison roulante, j'ai retrouvé un à un, comme du fond de ma fatigue, tous les bruits familiers d'une ville que j'aimais et d'une certaine heure où il m'arrivait de me sentir content. Le cri des vendeurs de journaux dans l'air déjà détendu, les derniers oiseaux dans le square, l'appel des marchands de sandwiches, la plainte des tramways dans les hauts tournants de la ville et cette rumeur du ciel avant que la nuit bascule sur le port, tout cela recomposait pour moi un itinéraire d'aveugle, que je connaissais bien avant d'entrer en prison. Oui, c'était l'heure où, il y avait bien longtemps, je me sentais content. Ce qui m'attendait alors, c'était toujours un sommeil léger et sans rêves. Et pourtant quelque chose était changé puisque, avec l'attente du lendemain, c'est ma cellule que j'ai retrouvée. Comme si les chemins familiers tracés dans les ciels d'été pouvaient mener aussi bien aux prisons qu'aux sommeils innocents. 审讯结束。走出法院登上车子的时候,一刹那间,我又闻到了夏日傍晚的气息,看到了夏日傍晚的色彩。在这走动着的,昏暗的囚室里,我仿佛从疲倦的深渊里听到了这座我所热爱的城市的,某个我有时感到满意的时刻种种熟悉的声音。在已经轻松的空气中飘散着卖报人的吆喝声,滞留在街头公园里的鸟雀的叫声,卖夹心面包的小贩的喊叫声,电车在城里高处转弯时的呻吟声,港口上方黑夜降临前空中的嘈杂声,这一切又在我心中画出了一条我在入狱前非常熟悉的,在城里随意乱跑时的路线。是的,这是很久以前我感到满意的那个时刻。那时候,等待我的总是轻松的、连梦也不作的睡眠。然而,有些事情已经起了变化,因为我又回到了牢房,等待着第二天。仿佛画在夏日天空中的熟悉的道路既能通向牢房,也能通向安静的睡眠。 |
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